Baptisé en référence à ses mines de sel, parmi les plus anciennes au monde, le Salzkammergut égrène ses paysages de cartes postale au gré des 76 lacs creusés par le glacier du Dachstein. Dans l’eau sombre, des villages au charme cossu reflètent leurs façades colorées égayant cette gangue de verdure qui semble tout recouvrir. Vertes forêts, vertes tourbières, verts pâturages, chalets de rondins et paysans en culotte de cuir. Le cliché autrichien vient se frotter aux flancs abrupts d’un magnifique massif calcaire.
« Ne vous inquiétez pas. Dans le Salzkammergut la pluie mouille moins qu’ailleurs » annonce - je avec aplomb au premier jour de notre séjour. La remarque fait rire certains, quand d'autres me regardent incrédules. C'est vrai qu'il pleut ce samedi. Mais il en faut bien de l'eau pour que cette campagne soit si belle, si généreusement verte. Et puis vous verrez. Quand ces montagnes timides osent se départir de leur voile de nuages, elles n'en sont que plus belles.
Je ne croyais pas si bien dire. À peine débarqués sur les rives de l’Attersee que déjà un rayon de soleil perce à travers les nuages. À l’abri d’une cabane de rondins surplombant le lac, nous prenons notre premier pique nique en appréciant le contraste entre le bleu cristallin de l’eau, et le ciel encore sombre. Nous avons eu le temps de prendre de la hauteur quand une averse nous repousse vers le village. Le charme cossu l’hôtel Aichinger nous fait vite oublier ces quelques gouttes.
La traversée en bateau de l’Attersee, offre un joli préambule à notre première vraie journée de marche. Dans la douce lumière du matin, les villages bordant le lac révèlent leur pittoresque, vastes chalets aux façades sculptées dans le plus pur style autrichien. Le long d’un chemin suspendu nous remontons les gorges du Burggrabenklamm vers les tourbières du Moosalm où les pontons blancs des linaigrettes dodelinent sous le vent. Une pause (baignade!?) au bord du lac de Schwarzensee, et nous redescendons à travers la carte postale alpine des hameaux de Rußbach, vertes collines émaillées de corps de ferme massifs.
C’est suivant le tracé d’une ancienne conduite de saumure, que nous quittons la cossue station thermale de Bad Ischl, ancienne résidence d’été de l’empereur François-Joseph,. Avec une grosse dizaine de mètres de dénivelée pour 18 kilomètres de marche, le sentier remonte en toute quiétude la vallée de la Traun pour rejoindre les eaux sombres du lac d’Hallstatt. Accrochée à flanc de montagne, la bourgade la plus célèbre de la région doit sa prospérité à ses gisements de sel, dont l’exploitation remonterait à près de 7000 ans. Un de ces lieux hors du temps dont la beauté efface l’importante fréquentation touristique.
Après une journée à visiter le coeur historique du Salzkammergut, nous enjambons le massif du Dachstein pour reprendre notre marche côté nature. L’un après l’autre, nous longeons les lacs de Gosau jusqu’à un vaste cirque surplombé par les glaciers du massif. Reflété par la surface lisse de l’eau, le calcaire nu des sommets du massif tranche avec cette forêt pleine de vie qui recouvre le fond du vallon. De retour au village de Gosau, nous profitons des derniers rayons pour aller découvrir les environs. Cette fois-ci le beau temps vient du Nord. À en croire les gens du coin, ça devrait durer.
Nous attaquons effectivement l’ultime journée sous un soleil radieux. Encouragés par la fraîcheur matinale, nous remontons rapidement la piste menant au col de Bodenberg pendant que dans notre dos les derniers nuages s’effilochent le long des crêtes acérées du Dachstein. C’est un meuglement expressif qui nous accueille dans les vertes prairies du Postalm. Il nous faut deux bonnes heures pour traverser le plus grand alpage d’Europe jusqu’à la barre rocheuse où le regard plonge vers les rives du lac de Wolfgangsee. Encore une longue descente, et nous apprécions la chope la plus méritée du séjour, un regard tourné vers le chemin parcouru.
Romantique! Il n’est de terme plus approprié pour décrire ce clocher posé au bord des eaux calmes de l’Abersee. La légende veut que Wolfgang de Ratisbonne, venu vivre en hermite dans la région, ait convaincu le diable de contribuer à la construction d’une église en échange du premier être vivant qui y entrerait…et qui s’avéra être un loup. Devenu un important pèlerinage, Saint Wolfgang gagna en notoriété avec la construction en 1878 de l’Auberge du Cheval Blanc, inspiratrice de l’opérette de Ralph Benatzky. Dans les ruelles centenaires les habitants arborent le costume traditionnel : chemise à carreaux et culotte de cuir pour les hommes, robe à corset pour les femmes. Un dernier bol d’Autriche avant de prendre le large.
Ce récit vous a donné envie de vous lancer à votre tour dans la découverte des lacs et montagnes du Salzkammergut ? Retrouvez les ici !
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Crédit texte et photo © Johannes Braun, accompagnateur Grand Angle
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Écrit le 23/03/2021 par :
Johannes Braun
Accompagnateur, reporter et photographe