Échos de la Grande Traversée des Alpes du sud

Échos de la Grande Traversée des Alpes du sud

Récits de voyages , Récits de l'équipe

Le départ du parc naturel régional du Queyras

La première fois que j’ai entendu parler de la Grande Traversée des Alpes de Briançon à Menton, j’étais adolescent. Un ami était revenu radieux de ces quinze jours de randonnée en brandissant ses chaussures Trappeur poussiéreuses comme gage de ce tour de force. Je l’ai considéré avec admiration sans me douter que quelques décennies plus tard, je deviendrai un fervent « accro » de la traversée des Alpes du sud.
Le projet de relier les Pays-Bas à la Méditerranée par un itinéraire qui jouerait à saute-mouton sur les Vosges, le Jura et les différents massifs de l’arc alpin, ne date pas d’hier. C’est une idée qui a fait son chemin durant les années 40 alors que l’Europe était encore à feu et à sang.
Passons sur les étapes situées au nord du quarante-cinquième parallèle pour entrer dans le monde lumineux des Alpes du sud.

Montée au Col Vieux © François Ribard
Montée au Col Vieux © François Ribard

 

Le parcours que j’ai suivi ces dernières années pour Grand Angle prend judicieusement le meilleur de l’itinéraire connu sous les dénominations GTA, Briançon-Menton, GR5 ou Via Alpina. Mais il s’en écarte à chaque fois que l’itinéraire officiel perd de son intérêt pour rester au plus près des cimes et des lacs qui jalonnent l’itinéraire. Quelques transferts intelligents ajoutent à l’intérêt du parcours en zappant les portions les plus fastidieuses. Résultat : un chef d’œuvre de traversée qui traverse le parc naturel régional du Queyras et le Parc national du Mercantour. En début d’été, l’exubérance floristique prend des proportions inédites ailleurs dans les Alpes.

Quant à la faune de montagne – marmottes, chamois et bouquetins en tête – jouissant d’une tranquillité enviable dans les secteurs protégés, elle se montre infiniment moins farouche que dans d’autres massifs alpins.
Le rendez-vous à Briançon permet aux randonneurs arrivés tôt de profiter de la cité Vauban. Tout le groupe se retrouve à la gare pour un transfert jusqu’au Fonts-de-Cervières, un ancien hameau pastoral qui rassemble quelques beaux chalets tout au bout de la vallée de la Cerveyrette. À 2040 mètres d’altitude, au pied du Pic de Rochebrune (3321 m), le premier gîte met tout de suite le groupe dans l’ambiance montagnarde des Alpes du Sud. Une ambiance que l’étape du lendemain affirmera encore.

Montée sur la crête de Malrif © François Ribard
Montée sur la crête de Malrif © François Ribard

 

De la crête schisteuse qui sépare le Briançonnais du Queyras, où la neige aime s’attarder en début de saison, le regard porte loin sur la ligne de 3000m qui borde le massif au sud, jusqu’au Mont Viso à l’est. Première descente, premier lac d’une longue série avant de longer les flancs de la vallée du Malrif où le début d’été révèle une profusion de fleurs.

Descente le long du Malrif © François Ribard
Descente le long du Malrif © François Ribard

 

Voici Abriès. Durant ces deux semaines de traversée, elles seront peu nombreuses les localités susceptibles de nous offrir un café en terrasse ou une flânerie dans les commerces du bourg. Alors on en profite en jetant un œil sur le circuit des pierres écrites – blocs gravés en façade des maisons – qui permet une découverte patrimoniale du bourg. De village, il en sera encore question le lendemain soir lorsqu’à l’issue d’une ascension de toute beauté, sous les auspices du Viso, et ponctuée par lacs les plus célèbres du Queyras – Egorgéou, Foréant – on gagne le Col Vieux, où un coup d’œil circulaire révèle des 4000 de légende : Mont Blanc et Barre des Écrins. Reste à traverser jusqu’au Col Agnel, au pied du Pain-de-Sucre, avant de dévaler les pentes qui mènent au village piémontais de Chianale. Au cœur des maisons anciennes, superbement restaurées, le gite du Laghi Blu de Cristina est une halte pleine de charme, que l’on quittera à regret pour retrouver la haute Ubaye et le Lac Longet source de l’Ubaye. La longue descente sur Maljasset, permet de prendre la mesure des vastes alpages où transhument les troupeaux de brebis. Un court transfert au hameau de Fouillouse nous met à pied d’œuvre pour une étape un peu plus courte que les deux précédentes, passant près de l’ancien casernement de Viraysse et de plusieurs ouvrages fortifiés qui stoppèrent l’avancée des troupes italiennes en juin 1940.

Au-dessus des baraquements de Viraysse © François Ribard
Au-dessus des baraquements de Viraysse © François Ribard

 

 

La découverte du Parc du Mercantour

Est-ce l’arrivée dans le Parc du Mercantour, les courses-poursuites des marmottes, l’originalité de certains passages ou la profusion des lacs ? Je ne saurais dire ce qui m’emballe dans cette journée qui nous mène du Col de Larche au refuge de Vens ? Au Pas de la Cavale se révèlent tous les sommets de la haute Tinée.

Au Pas de la Cavale (2671m) © François Ribard
Au Pas de la Cavale (2671m) © François Ribard

 

Près des Lacs d’Agnel, on quitte le parcours « officiel » de la traversée pour remonter le long des lacs jusqu’au Pas de Morgon, dans une ambiance de bout du monde que l’arrivée au refuge conclue en beauté.
Les somptueux lacs de Vens nous escortent avant la très longue descente sur Saint-Étienne-de-Tinée, dernière opportunité de profiter d’un bourg animé avant un transfert jusqu’en Vésubie. Les plus longues étapes sont derrière nous ; nous entrons dans les sortilèges du Mercantour. Boules de granite, mélèzes et pins Cembros nous escortent au départ des vallées et bientôt chamois et bouquetins nous accompagneront au plus près.

Jeune bouquetin mâle près du Col de Fenestre © François Ribard
Jeune bouquetin mâle près du Col de Fenestre © François Ribard

 

Les découvertes se succèdent, entre Le Boréon et La Madone-de-Fenestre, surprenante enclave religieuse au pied de la Cime du Gélas (3143m), point culminant du massif. Suit une journée plus courte mais qui nous gratifie du spectacle de plusieurs lacs glaciaires et des hauts sommets du Mercantour, frontaliers avec l’Italie. Elle nous conduit à Saint-Grat, au cœur de la vallée de la Gordolasque pour profiter d’une fin d’après-midi de repos appréciable car dès potron-minet, une rude montée au Pas de l’Arpette nous fera entrer dans la vallée des Merveilles. Nous sommes quelques accompagnateurs au sein de l’équipe Grand Angle à bénéficier de l’agrément qui nous autorise à circuler librement dans le secteur protégé des gravures.

Gravure de la vallée des Merveilles © François Ribard
Gravure de la vallée des Merveilles © François Ribard

 

C’est le sésame indispensable pour aller découvrir les motifs les plus célèbres – le Sorcier, l’Anthropomorphe aux bras en zig-zag – dans un extraordinaire univers minéral vert, rouge, violet, rehaussé du bleu des lacs.

Dessin des gravures par le randonneur Éric Ruelle © François Ribard
Dessin des gravures par le randonneur Éric Ruelle © François Ribard

 

L'arrivée sur le littoral de Menton

Nous quittons ces hautes terres enchantées par le Pas du Diable où pour peu que l’atmosphère soit claire, nous voyons scintiller la Méditerranée au-delà des cités du littoral. En gagnant le plateau de l’Authion, à 2000 mètres d’altitude, nous retrouvons les ouvrages militaires fortifiés à la fin du XIXe siècle, puis renforcés lors de l’édification de la ligne Maginot alpine, dans un univers pastoral à la richesse floristique rare.

Des abords du Col du Turini à Sospel il reste du chemin à parcourir pour la plus longue étape qui nous fait passer du pin cembro à l’olivier en longeant les crêtes qui dominent la vallée de la Bévéra. L’étape en hôtel à Sainte-Agnès, réputé « plus haut village littoral d’Europe », conclue en beauté ce périple qui se termine par une jolie descente jusqu’à la grande bleue, après un beau parcours dans les ruelles du vieux Menton.

Goéland leucophée © François Ribard
Goéland leucophée © François Ribard

 

Ce récit vous a donné envie de vous lancer à votre tour dans cette belle aventure dans les Alpes du Sud ? Retrouvez nos voyages en cliquant ici

 

Crédits texte & photos : © François Ribard

 

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